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Café Littéraire. Espace ou naissent et se croisent toutes formes d'écrits: slams/poésie/contes/nouvelles/romans/théâtre. Tous les jeudis de 18h à 20h au CEBULAC (Burundi Palace, 1er étage), en plein centre de Bujumbura. Entrée libre et gratuite.

mercredi 4 décembre 2013

Rencontre avec ce Burundi qui s'intéresse au livre, à l'écrit

Du 1 au 14 août 2013 avait lieu la présentation de l'anthologie "Émergences - Renaître ensemble" dans sept* Centres de lecture et d'animation culturelle (CLAC) à travers le Burundi, en plus du Centre Jeunes Kamenge. Un périple que nous fait découvrir les membres du café-littéraire Samandari ...

A Gatara, Tanguy Bitariho lors de la présentation d'un conte sur le respect
envers la femme, mère, créatrice ©Samandari
Le plus vibrant Clac n'est pas à Gitega, ni à Ngozi, ou encore le long du Tanganyika. Aaah non !, il faut le vivre pour l'admettre ! Imaginez, un long chemin en terre battue, ocre, légère en cet été plein, et rouler. Rouler, une heure, deux… Ah oui, il faut s'armer de patience pour s'engager dans la petite localité de Mutumba. L'extrême Est de Karusi. Cent kilomètres plus loin, et c'est la Tanzanie.
Ici, dans cet après-midi languissant et frais, l'administrateur communal s'est en personne déplacé pour nous accueillir. De jeunes tambourinaires dansent à l'honneur des
invités de Bujumbura ... Des chevreaux nous fixent, ahuris.

L'ambiance presque timide s'évaporera vite dès que nous serons entrés dans la salle du Clac, rapidement remplie d'une centaine d'écoliers, élèves, étudiants, professeur et même le vieux Jean, agriculteur de son état, qui lance joyeusement :
"Moi, si j'étais encore jeune, je lirais des bouquins d'arithmétique !" Rires dans la salle.
On va beaucoup rire dans les deux heures qui suivront.

Parce qu'ici, les jeunes filles n'ont pas peur de se lever et de poser des questions : "Qu'est-ce qu'une nouvelle ?" Parce qu'ici, on veut savoir : "Comment être un écrivain ?", "Comment faire en sorte que son texte paraisse dans une anthologie ?", avant que le jeune Médard, 14 ans, inscrit à l'École primaire de Rabiro nous serve le plat du jour : un magnifique bout de poème intitulé Le petit coiffeur.

A Rumonge; le petit Gabriel (9 ans) déclame un poème ....
 ©Samandari
Le slam et le conte, en plus

Si Mutumba coiffe au poteau le reste des Clac en matière de réactivité, cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas de vie dans les autres centres, dans lesquels on rencontrera en moyenne une cinquantaine d'abonnés.

A Rumonge, alors que les Témoins de Jéhovah officiaient juste à côté, cet enseignant du lycée Mutambara avouait spontanément que c'était la première fois qu'il entendait le mot slam : "C'est slam ... ou islam ? " Après déclamation de "Ma muse à moi m'amuse", Alain Horutanga, slameur, se lance dans un passionnant retour sur les origines de cet art oratoire, rappelant qu'il est, "simplement, l'écrit à l'oral" ... Du coup, élèves et professeurs ont tenu à savoir "si c'est du slam, Le Corbeau et le Renard déclamé ..."

A Gatara, Tanguy Bitariho venait de livrer un conte très fort sur "Ce que nous racontent les femmes : l'histoire de la vie", quand des doigts se levèrent. On voulait plus de précisions sur la part de l'autobiographique ou de la fiction dans son récit : "Le travail du conteur c'est d'offrir la vérité et le mensonge à la fois, de sorte que chacun y trouve son compte …" répliquera-t-il. Et à Spirate, professeur de français de s'interroger devant la belle maîtrise orale du slameur/conteur : "Pourquoi nos élèves ne maîtrisent pas autant que toi le français ?"
S'en suivra une longue discussion animée, entre autres, par la dizaine d'enseignants sur place sur les méthodes pédagogiques de transmission du français, l'exercice étant de décortiquer l'enseignement magistral opposé, presque, à l'approche communicative …

Plus au nord, à Gashikanwa, nous serons agréablement surpris par le passage de Mme l'administrateur de la commune venue "saluer les invités de Bujumbura" et "encourager encore plus la jeunesse des localités environnantes à fréquenter le Clac " ... L'animatrice du jour, la jeune Floriane Niyungeko, présentait alors son expérience en tant que rédactrice en chef d'Oasis, le journal de son lycée, à Rohero (Bujumbura).

A Mutumba, Ketty Nivyabandi présentant le travail
du café-littéraire Samandari ©Samandari
Et puis, comment oublier les salutations amicalement musclées au Clac de Mugina, à Cibitoke, qui, pour nous signifier la vitalité des lieux, plaça cinq minutes de démonstration du club de karaté du centre ? Un esprit sain dans un corps sain, crut-on comprendre ...
L'urgence de revenir

Revenons à Mutumba. Au terme de ce sixième rendez-vous littéraire à l'intérieur du pays (l'expression n'est pas des plus heureuses), on avait envie de revenir.

Le programme avait été respecté, comme ailleurs dans les Clac : présentation des visiteurs (deux membres du café-littéraire Samandari ainsi que Léonidas Ndayiragije, Coordinateur national des Clac) suivi d'une séance d'animation autour du livre.

À Mutumba, Ketty Nivyabandi était revenue sur le recueil du café-littéraire Samandari
In-dépendance.

Puis Roland Rugero avait présenté l'anthologie des auteurs de la région des Grands Lacs avant de clore la séance par une séance de questions-réponses, prix à la clé (cahiers, dictionnaire Larousse, stylos, exemplaires des recueils du Prix Michel Kayoya ...)
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Des prix certes modestes, mais réjouissant à la veille de la rentrée scolaire.

Mutumba, nous disions donc, nous donnera l'envie de revenir. D'urgence 
: "Puis-je avoir votre numéro Madame, pour savoir comment adhérer au Samandari ?" s'entendra demander Ketty Nivyadandi, par un élève du coin. Ici, il y a ce petit quelque chose, une terrible envie de s'ouvrir au monde, dans la joie, sans crainte. Et d’ajouter :
"Êtes-vous mariée ?"
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Le Burundi, avec ses 22 centres, est le pays le plus fourni en Clac dans les pays francophones. L'installation de chaque centre coûte environ 200.000 Euros, soit autour de 400 millions Fbu. Outre une bibliothèque, les Clac offrent des jeux de société, des espaces de performance (théâtre, lecture) mais aussi l'accès à des programmes audiovisuels de qualité grâce à la chaîne TV 5 (documentaires, cinéma, musique, informations générales) ...
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* Rumonge (Bururi), Gishubi (Gitega), Gatara (Kayanza), Bukeye (Muramvya), Gashikanwa (Ngozi), Mugina (Cibitoke)

** Des prix obtenus grâce au Centre burundais de lecture et d'animation culturel (Cebulac)

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