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Café Littéraire. Espace ou naissent et se croisent toutes formes d'écrits: slams/poésie/contes/nouvelles/romans/théâtre. Tous les jeudis de 18h à 20h au CEBULAC (Burundi Palace, 1er étage), en plein centre de Bujumbura. Entrée libre et gratuite.

lundi 26 décembre 2011

Dîtes à ma femme que je ne rentrerai pas pour Noël

Minuit 14h17, temps local, tension artérielle normale
La lune ne veut pas se montrer
Peut-être les chiens du voisin l’ont mangé
Il y a une heure et quelques minutes,
Ils aboyaient comme s’ils avaient attrapé un chacal
Je croyais qu’ils mangeaient la lune
Non, Seigneur, pas encore…
Ils mangeaient l’inconnu qui se cachait dans le sous-sol de nos vies de misères
Ils se régalaient, les chiens, de l’homme condamné sans jugement
Les fauves festoyaient les derniers instants d’un innocent

L’homme entre les crocs des carnivores s’appelait Citoyen
Ses yeux comme des boussoles indiquaient la fin de sa marche
Ses bras en croix traduisaient l’absence de pitié du tueur
Et la note dans sa poche résumait la fin de toutes les saisons
La note, une phrase tatouée sur son front disait :
Dîtes à ma femme que je ne rentrerai pas pour Noël
Et des points de suspension comme des points d’orgue
Des espaces vides comme un sémaphore à sa femme :
C’est mon dernier réveillon
Un message codé qui voulait dire :
Le chagrin me tient en laisse
Pour que je ne morde pas aux passants qui se moquent de moi
La souffrance me cloue au lit
Les hôpitaux m’empoisonnent d’espoir
Hélas, la mort ne veut pas que je rejoigne son troupeau
J’ai encore des litres de souffrances amères à boire
Dîtes à ma femme que je ne rentrerai pas pour Noël
Que j’attendrai le tueur embusqué dans ma vie
Qu’il m’assassine et qu’il efface mon histoire


Des sources incertaines, des morts que j’enterre, j’ai appris
Que le tueur, la nuit, a fui vers les montagnes
Il avait, autour de ses yeux, pour ne pas voir ses victimes pleurer
Une cravate en bijoux de sang
Et une chemise taillée dans un tissu grossier
Qui suintait le sang
A la frontière, on ne l’a pas arrêté
Les douaniers, quand il a passé, ont pleuré
L’ont laissé passer, histoire de ne pas se souiller les mains
Sur un long bambou bien pointu
Les membres de ses victimes en brochette pendaient
Il fuyait son histoire et ses mensonges
Entassés sur des mètres cubes d’un passé illicite et mal sevré


Un homme a été enterré vivant qui voulait l’allaiter
Il s’appelait Pardon
Le tueur l’a embroché d’un coup mortel
Et il a continué son chemin
Un autre qui lui demandait des comptes
Le tueur lui a crevé les yeux
Le mort s’appelait Cœur
Le tueur a suivi son chemin
Sur des béquilles mal ajustées
Il se déplaçait vers le sud de sa destinée
Impatient de croiser le faucheur du temps
Hâte de retrouver ses anciens copains


Le mort de minuit ne pensait qu’à sa femme qui resterait seule
Et dans sa paume il avait griffonné :
Dîtes à ma femme d’être forte
Et de ne pas prolonger le deuil
L’assassin, dans la foule, pourrait faire le malin
Et abattre l’orphelin et s’approprier la souffrance des voisins
Et t’exiler vers la forêt ou vers le fond du lac
Et dans l’autre paume il avait dessiné
Trois points de suspension
Comme pour me dire : dis à ma femme de fuir


J’en ai assez d’être fossoyeur
Et d’enterrer des innocents démembrés
Assoiffé de justice, affamé de vérité
Les bras levés vers le ciel, j’implore
Je fais appel à tous les anges du royaume
Je réveille, à grands cris, les dieux des volcans éteints
Fossoyeur angoissé, je descends les dernières marches de mon espoir
Le chagrin me ramène au bas de l’échelle
Et sur une corde de quelques centimètres
Je compte les jours qui me restent
Avant que le tueur ne s’en prenne à moi


Pas plus tard que dans un mois
Peut-être, si le ciel est clément, dans un an
Je ne serai plus
Fini le fossoyeur, le seul qui empêchait les charognards
De se ruer sur les cadavres entassés sur la berge du lac
Le facteur des derniers instants


Ce soir, avant que le soleil ne meure
L’assassin, d’un regard froid me demandera s’il y a une place au cimetière
Sans hésiter, je lui dire : deux places !
Un pour moi et un pour lui
D’un coup, je boirai le calice jusqu’à la lie,
Avalerai la bouteille et le bouchon
Le poison est des fois sucré, que l’assassin disait aux victimes


Sans peur, je dirai à l’assassin
Ne dîtes pas à ma femme que c’est mon dernier Noël
Elle est délicate, la nouvelle le tuerait
Il aura les yeux de son fusil dans mon regard
Et sa baïonnette sur ma gorge dessinera le dernier jugement
De mon gré, je mourrai
De mon choix, je me ferai assommer
Pour rejoindre les victimes de l’assassin des collines


Sur la tombe de l’assassin qui court toujours
En caractères noirs de colère on gravera
Qu’il repose en tourments… et en tourbillons
Et sur la pierre tombale du mort de minuit
Il y aura des fleurs qui viennent du monde
Et des discours de chagrin de la veuve et de l’orphelin


Et dans les annales de la mort
Pour garder au frais la mémoire des victimes
Et des innocents empaillés contre leur gré
Le scribe écrira :
Ci-gisent les innocents du Burundi.

Le Fossoyeur

Par Thierry Manirmbona

vendredi 18 novembre 2011

A travers tout

A travers le vacarme et le brouhaha  
Sache y  déceler une voix timide  
Une voix douce et tendre  
Qui t’appelle par ton précieux nom  
Et t’invite à partager  
L’amour, le bonheur et le luxe  
Qui te sont offert sans que tu sois  
Le plus méritant ou excellent   
 
A travers fumée et flammes  
Sache y  distinguer une lueur  
Qui éclaire ton passage pas à pas  
Te conduisant sur le chemin de la sagesse  
Richesse qui prédomine tout  
Pour un cœur d’homme digne de ce nom  
Et avec lequel tu bâtiras ta vie  
Tes principes et tes résolutions 

A travers pleurs et larmes  
Sache écouter leur signification  
C’est soit l’amertume soit la joie  
L’abondance du bonheur ou lacune d’amour  
Ramollis ton cœur et sois compatissant  
Tu sais bien que par l’expression de ton visage  
Tu peux tout dire et ne rien dire  
La vie est faite de symboles 
Estelle Muhimbare, novembre 2011

mardi 25 octobre 2011

" Ce qu’il faut garder ", d'Abdoul Mtoka

« Ô mère, dis-moi
Ce Lac n’est-il pas à nous ?
N’est-ce pas toi
Qui m’as appris
Le secret des Pêcheurs
Qui vivaient sur la berge
Et qui protecteurs du Fort
Chantaient des psaumes merveilleux
Dans la nuit étoilée
Les rivages enchantés
Et les eaux argentées ?
Ah, ce temps-là, disais-tu
Régnaient calme, bon voisinage
Et noblesse vertueuse ! »

L’enfant entend encore
Cloîtré dans l’antichambre mémorielle
Surgir tous vifs, énergiques
Ces récits d’hier qui affluent
Un hier plongé dans la brume
De crainte d’écorcher le présent
Ou d’enrager les faussaires
D’une histoire sélective
Ou démasquer les usurpateurs
D’une demeure subtilisée,
Et dans cette tête encombrée
Par la cohue des souvenirs
Habitée par un monceau
De Nouvelles combustibles
Au fond d’une bâtisse
Insalubre et mitée
Secouée par les mistrals du temps
Il convoque la déposition
D’un témoin auriculaire
De notre profond désarroi.

« Ah, misérable destin !
Maudit soit le jour
Où les Envahisseurs sont arrivés
Nous ont tancés
Ont saccagé les villages
Ont spolié l’autochtone
Ont récupéré le Butin
Et l’étendue des bords lacustres
Comme par diverses rhétoriques
Ont aussi terrorisé nos esprits
Marqués au fer pourpré
Et nous déclarer par contumace
Comble des malheurs
Instigateurs de l’Invasion !
Mais le coup de grâce scélérat
Nos héritiers allaient payer
Le coût des deux peines
Au cœur des décombres. »

L’enfant observe tranquillement
Les joueurs de notre quartier
Valser avec un ballon rebelle
Sans violon ni hautbois
Des hourras d’euphorie explosent
Pour le but qui délivre
Engagé dans la lucarne
Par le retors aux pieds bénis
Le Messi(e) du recoin
Qui cadence, avance, lance, danse
Aux rythmes frénétiques
Evoquant l’ancestrale cérémonie
Et ce génie artistique
Qui électrise la foule
En proie à une forte et brusque
Convulsion métaphysique
Art réveillé, célébré, chanté !

« Ô mère, renseigne-moi
Sur les pervenches exotiques
Qui ont été pourchassées
Dans le Jardin des délices
Car distinguées, remarquables
Non par leur texture ni couleur
Mais par leurs méconnues odeurs
Langage sonore, lueur.

Ô mère, raconte-moi
Avaient-elles commis le même forfait
Qu’Adam et Eve
Dans l’autre jardin souillé
Par le même vœu qui nous tourmente
L’envie, ô misère, l’envie de l’homme ?
Est-ce que sucer un autre sein
Que celui de la mère revendiquée
Affecte le droit de séjour
Dans la maison maternelle ?

Ô mère, la tempête menace
La foudre courroucée frappe
Enseigne-moi la science
De lire dans les yeux d’un homme
Sa détresse ou son soulagement
Afin de lui décrocher la lune
Au plus sombre des ténèbres,
Non les tactiques acerbes
D’y plonger le regard boursicoteur
Pour évaluer l’utilité dont il me profite.

Ô mère, accorde-moi ta grâce
Que j’aille fouler les landes
Les vallées, les terres généreuses
De notre beau pays
Sans redouter de trébucher
Sur l’écueil d’un malveillant
L’arbitragiste du politique.

Ô mère, réapprends-moi
A vivre, à être libre
Car ce n’est ni livre ni ivre
Que je saurais être à la hauteur
De ce rêve d’un chez moi rassuré
Qui sera le chez nous à tous
Au-delà du destin singulier. »

Les Sages de notre quartier
(Peut-on vraiment traduire
Le mot Mzee dans cette langue ?)
Tout au long de la conversation
Boivent du café réchauffé
A l’ombre des cocotiers
Des palmiers, des manguiers
Qui fleurent le souffle vespéral
Erigés puissamment
De cette chair dure ocrée
Qui nous appartient
Triste souvenir éveillé
Dans l’inconscient étamé
De l’absence de pouvoir
Qui résume notre crédo.

Le marchand de poisson arrive
Déballant sa marchandise
L’odeur lisse de Tanganyika
Et de ceux qui se sont fait avoir
S’incruste dans les palais
Et l’on négocie leur prix
A coups de stratégie
A court d’imagination
L’on se résout à l’évidence
Ah, qu’il nous est ardu
De vivre loin des côtes.

Ce soir, la famille jubilera
On fumera la proie
On l’enduira d’épices
Et le septuagénaire lucide
Le cœur à la renverse
Se souviendra de l’enfance
En savourant amèrement
La chair et l’histoire
Des habitants du rivage
Qui vivaient paisiblement
Insouciants, fraternels
Avant la nouvelle ère
Du mensonge et de l’accusation.

« Fils, ce qu’il faut garder
C’est des milliers d’opprimés
Qui tanguent perdus
Dans les marigots de l’oubli,
Qui sous la rumeur impie
Subissent l’éperon du décret
Et des ordonnances infligées,
Qui flanchent soudainement
A la vue d’un haut-gradé,
Qui s’excusent volontiers
D’être, d’être là.

Fils, ce qu’il faut garder
C’est une foule d’enfants
Misérables, déboussolés
Soleils ardents de demain
Que tu ne vois sur le coup
Qui sont privés de carte
De statut, de mémoire altérée
Des laissés-pour-compte
Dont les rêves sont confisqués
Dès qu’ils affrontent le monde.

Fils, ce qu’il faut garder
C’est la Parole sacrée
Qui dans la pénombre
Veille sur les Nôtres
Qui nage dans le Poème
Ecrit dans le Livre ouvert
Que seuls les initiés
Peuvent encore déchiffrer
Qui parle d’océans, de fleurs
De lumière, de miel
D’olives, de raisins
De fleuves, de la lune
De l’exil toujours forcé
De la rédemption proche.

Fils, ce qu’il faut garder
C’est les plans de ton ennemi
Des toiles d’araignées,
La source où il puise
Du vin âcre de palmier
Non le lait nourrissant,
L’école où il dresse
Une caserne qui rudoie
Qui reproche, qui punit
Et qui jamais n’aime.

Fils, ce qu’il faut garder
C’est l’Espérance douloureuse
En un lendemain radieux. »

vendredi 21 octobre 2011

" Qui ? " La réponse de Roland Rugero

Après la publication du poème " Qui ? " de Ketty Nivyabandi, la réponse de Roland Rugero ...

Mère,

J'ai bien lu ton appel !

J'arrive, j'accours !

Oui, j'ai bien lu ta berceuse.

Que tu es forte,

Toi qui t'apprêtes à bercer dans ton dos

Sentant la lune et le doux soleil des terres apaisées,

« Un petit garçon aux airs de grand patron »

Que tu es si forte,

Comme j'ai envie de te dire tout sur moi,

Sur celui « qui m'a fait si mal, si peur! »...

Que tu es si riche, de tes seins, de tes siens, de tes sens,

Toi qui veux m'arracher aux griffes du dieu fric,

Cette pitance traître, qui tresse dans mes cheveux

Parfumés à l'huile des femmes légères,

Des rêves barbouillés d'images dorés.

Que tu es patiente,

Toi qui attendra que s'éteigne ma soif de tout posséder

En m'arrosant de tes berceuses, et de tes caresses.

Que tu es lionne, Mère,

Toi qui t'apprête à câliner mon crâne poilu d'une savane blanche,

Dans laquelle courent des visions, des bêtes-ennemies,

Des soifs de longévité, des courtisanes agiles et des serviteurs-hyènes.

Que tu es sainte, que tu es forte, Mère,

Toi qui veut laver mon corps sentant des odeurs

Ni chrétiennes, ni musulmanes, ni bouddhistes, ni naturelles,

Des relents d'outre-lit;

Mon corps peint en rouge,

Mes victimes ayant l'habitude de pleurer dans leurs coeurs endoloris,

Des larmes mensuelles à l'honneur de ma brutalité...

Mère, oui, prends-moi dans ton dos.

Je me ferai petit, j'humerai avec humilité ta sueur divinement humaine et apaisante,

Je geindrai sur ton corps arqué d'amour et d'espoir,

Je lèverai mes yeux embués vers ton cou.

Et je t'étranglerai, en murmurant : « C'est toi qui m'a rendu ainsi, pour m'avoir mis au monde! »

mardi 11 octobre 2011

" Qui ", par Ketty Nivyabandi Bikura

Petit garçon
Sous tes airs de grand patron
Qui t’a fait si peur ?
Qui t’a fait si mal ?
Que pour te sentir homme
... Il te faille voir en tout être
Une proie,
Un marché…
Avoir dans tes yeux d’ogre
Une faim que nul banquier
Ne saurait rassasier
Et être possédé par cette envie urgente
De tout posséder

Petit garçon
Sous tes airs de grand président
Qui t’a fait si peur ?
Qui t’a fait si mal ?
Que pour avoir confiance en toi
Il te faille des prisons
Gorgées d’opposants
Des pirouettes à libre vent
Pour, en tout temps
Bruler l’encens de tes louanges
Et des portraits de toi
Dans toutes les huttes de la nation

Petit garçon
Sous tes airs de grand violeur
Qui t’a fait si peur ?
Qui t’a fait si mal ?
Que pour te sentir fort
Il te faille tant te haïr
Détruire avec toi
La vie de celle
Qui donne la vie
Mais rester perdu
Sur les quais de la démence
Ta petite queue toute trempée de sang
De mamans...

Petit garçon
Sous tes faux airs de grand
Enlève tes souliers boueux
Viens, poses ta tête fiévreuse
Sur mon sein
Pleures moi tes hontes
Raconte moi,
Qui a décroché la lune de tes yeux ?
Dis moi qui t’a menti
Que pour guérir tes bobos
Il fallait faire si mal à l’autre ?

Je te serrerais dans mes bras
Je chasserais les méchants
Je te dirais
Que tu n’es un bout de personne
Et qu’a toi seul
Tu es homme
Je te dirais que je t’aime
Avec tes carcasses de rêves
Et ton orgueil en miettes
Je te dirais qu’en toi se trouvent
Tous les trésors sous le soleil
Je boirai le sel de tes larmes
Je te bercerais dans la chaleur de mon dos
Et lorsque tu t’endormiras
Je te soufflerais à l’oreille
Que plus personne ne te fera peur
Que plus personne ne te fera mal.

K.N. 2011

mardi 27 septembre 2011

" Aux morts de Gatumba ", un hommage de Thierry Manirambona

Aux morts de Gatumba

Tous les soirs au clair de la lune
Sous un ouragan de tristesse
Je viendrai verser mon angoisse
Là où vous gisez sous les dunes

Je cueillerai le chrysanthème
Et l'anémone solitaire
Les belles fleurs des cimetières
Car je suis seul et je vous aime

Telle une tour de la cathédrale
Où sonne le glas de folie
Je plante la mélancolie
Dans un cœur aux souvenirs noirs

_______________________________________________

Les morts de nos collines

Quand on annonce la nouvelle
De la mort d'un être si cher
L'homme dont on était si fier
Jamais on ne croit à ces paroles
Souvent on se dit qu'on se trompe
On pense à une rumeur
Mais terrassé par la fureur
Les liens de la raison se rompent
L’annonceur une fois dehors
Déchiffrant le sens des douleurs
Et des signes avant couleur
On prend conscience de la mort
Et l’on pleure et l’on s'agite
Coulent les larmes des beaux yeux
En implorant tous les grands dieux
On ne dit rien, mais on s'agite
On ne sait plus l’heure qu’il est
Si le temps avance, recule
Tête courbée comme la mule
On pleure, on ne sait qu’hurler
Voyant l’enfant dans le cercueil
Ses doux, beaux yeux clos à jamais
Les yeux qu'on avait tant aimés
On va sangloter sur le seuil
Voyant le garçon dans la bière
Ce gars à la voix poétique
Qui n'a plus qu'un regard mystique
On va pleurer à la rivière
Lorsqu’ on embrasse le défunt
Qu'on avait laissé le matin
Ou sur le corps laid de la morte
L’enfant pour qui l’on est poète
Le justicier n'y comprend rien
Son savoir n'ayant aucun rôle
Avalant toutes ses paroles
Il pleure chaudement les siens
Tous pleurent devant le mystère
La philosophie n'y peut rien
La sorcellerie n'y peut rien
Quand vient la mort on doit se taire
La mort d'un si cher personnage
Confond le grand chiromancien
Le sorcier et le magicien
Tous ne voient que de flous mirages
La raison, même la logique,
Les sciences du mal et du bien…
N’y pigent rien, comprennent rien,
A ce long voyage si magique.
Et même les plus grands ermites,
Pleurent bas le départ des leurs
Comme le jardinier ses fleurs,
Qu'un violent ouragan visite.
Le moine, le grand moine lui
Que rien ne devait émouvoir
Ne tremblant sous aucun pouvoir
Sur sa joue une larme luit.
Le moine, le grand solitaire
Que rien ne devait émouvoir
Malgré tout se laisse avoir
Par la mort, le plus grand mystère
Dans le fin fond du monastère
Il pleure la mort de la fille
Qu'il a laissée pleurant en ville
Par l'amour de la vie austère
Quand passe le lourd corbillard
Rassasié de celle qu'on aime
Qui porte ton beau chrysanthème
La raison fuit plus qu'un fuyard
On entend de partout la voix
De celle qu’on avait aimée
Et les fleurs qu’on avait semées
Se courbent au poids de la croix
On entend toujours un appel
Un cri de sa chère maman
Qui rappelle les bons moments
Qu'on passerait dans la chapelle
On se souvient de ces instants
De ces histoires amusantes
On se souvient de son amante
Qui ne l'est plus dorénavant
Après le signe de la croix
Viennent les tristes requiem
Accompagnant celle qu’on aime
Dans un long murmure de voix
Et quand enfin au cimetière
On met des pelletées de larmes
Sur le corps de celui qu'on aime

lundi 5 septembre 2011

Tolerance Umuliyoni

igisomwa canditswe na Joseph Butoyi

Amaso n’amasazi. Eka n’amatwi ni co kimwe. Amaso atwereka ibiterasoni tutipfuza kubona, amatwi nayo adutuma kwumva ibituntuza umutima. Ejo nahumutse kuri kagakecuru Makoma kariko karihagarika kunzira, maze ibimaramare binshwara umubiri wose, vyanka ko mbandanya, vyanka nuko nsubira inyuma. Sha abakecu….

- Mbe Baryumuhero, ko widogera abakecuru n’ibiki ? Nimba ka Makoma kari kabuze kasugumwe k’ingenzi, wagomba kagire gute nimba umusonga warugasugereje ?

- Kandi sha Yoha ! Reka tureke ka Makoma ndagucire agace kuvyo nabonye k’umusase, aho mvuye gusarura amakuru, hariya mu burengero bwa Afrika, muri ca gihugu citwa Ikirezi ca Afrika, kimwe mugabo abamenyeshamakuru nizindi ncabwenge basigaye bita « Igisebe ca Afrika ».

- Baryumuhe, « Igisebe ca Afrika » !

- Egome. Ngo ni kubera ico gihugu gisigaye kiva amaraso iminsi yose, kandi mu mpande nyishi zaco. Waruzi ko Ikirezi ca Afrika ari, kuva nakera narindi, igihugu ciza cane gose, kandi gifise ubutunzi bwinshi bw’isi n’ubwo abantu bincabwenge.Eka n’imvura igwa iminsi nka yose y’umwaka. Mugabo ubu gisigaye kirira ijisho rimwe nk’agakecuru kagwaye akabonge kubera abako bagahezeko. Umukuru waco, Kananirabagabo Jean-Nemrod, yarasanzwe agira umunsi mukuru wo kw’ibuka umwaka uheze atsinze amatora yamushikanye ubwambere k’ubutegetsi mw’ukuru w’igihugu Ikirezi ca Afrika. Hari kw’igenekerezo rya mirongitatu na gatandatu z’uku turimwo.

- Kananirabagabo yariko agira kimwe bita mu gifaransa anniversaire y’intsinzi mu matora.

- Ego, tega amatwi nyabuna ndakubwire inkuru nshansha.

- Bayita, inkuru itarakora hasi.

- Ururimi ruragoye mwenema ; umviriza cobo iyo nkuru ntarayibagira. Kandi ntuze uranciramwo.

Isi yose yari yakoranye. Abakuru b’ amakungu canke ivyegera vyabo kubafatiriwe n’amabanga. Ivyegera vya Kananirabagabo. Abakuru b’Inama Nshingamateka na Nkenguzamateka. Abashikiranganji, abaserukira ibihugu vya rutura n’abaserukira ibihugu bibanyi. Abakuru b’ubutungane, ba ntanyiganzwa mu ntwaramiheto no mu nyamiramabi, abakuru b’imigambwe canke amashirahamwe adaharanira inyungu za politike canke y’igenga, eka n’abandi bategetsi bakomeye bo murico gihugu, ntibagiye abakuru b’amadini, bivuga ko n’Imana yari yatumiwe. Yoha, haca uwambaye ! Abera, abirabura, abatukura, eka n’abasa n’umuhondo ntibari batanzwe. Amakoti n’imishanana vyaca ibibatsi. Akarato kari dododo.

Amaradiyo n’imboneshakure vyacanacanako kugira biyage vyongere vyereke ibirori banyarucari canke imbundege zose zitemerewe guhonyoza ikirenge mu ngoro y’ Inama Nshingamateka Magaburanyama aho ibirori vyariko birabera.

Inyamiramabi zari zarikanuye. Abasirikare ryari ryahiye kugeza aho bagenzura isi, ibiyaga eka n’ijuru. Ntanyoni yaguruka. Indege gusa. Indege zari zifatiye ikirere kugira ngo agakirutsa umutwe sisavye. Inzira nka zose zari zazibiwe. Abagenda n’ibihinda, eka n’abamaguru abiri canke amakinga, bagenda baridoga ko batagira aho baca kugira baje kurondera icorirenza.

K’umusase ushira umurango, niho twumva akanira gahinda kava k’umusozi uhanamiye igisagara Karabadukakane, ariwo mugwa mukuru w’igihugu Ikirezi ca Afrika, gaca ku ngoro y’icariho c’uwuhagarariye imitima y’abantu kw’isi, gatumbera mu bumanuko bw’igihugu Ikirezi ca Afrika, kajabuka uruzi Ntawupfabishaka, mpaka no mu ngoro y’amakoraniro y’Inama Nshingamateka Magaburanyama. Kari gakurikiwe n’ingendeshwa zinganya agaciro n’ivuriro ryiza ry’abanyagihugu. Hari n’izindi zipakiye abasirikare n’inyamiramabi bambaye amasasu kuva k’umushatsi gushika kw’ino. Amaso bari batunuye nk’abanywi b’urumogi canke kanyanga. Indenge za gisirikare zacanacanako. Wihweje ingendeshwa n’urwamo rwazo, indege n’induru yazo, amapikipiki n’amaborogo yazo, akanira n’abasirikare, utibagiye rusehabaniha, wamengo n’igisigo co mw’ibenga c’imutse muci.

Akanira gashitse imbere y’ingoro Magaburanyama kaciye ngo cwe. Muri imwe mu ngendeshwa z’iteka haciye hasohoka umukuru w’igihugu Kananirabagabo, akikijwe n’abasirikare n’abandi bategetsi. Yari ayagayaga nk’inkumi y’inoye, ashajije nk’ikigori ca kijambere caronse umwavu ukwiye. Mu bisanzwe, Kananirabagabo asanzwe ari umugabo muremure, atanamvye kandi atavyibushe birenze, w’imisaya igororotse n’uruhanga ruhanitse. Afise amasoso maremare kandi akunda gusokoza ruhanika. Rimwe na rimwe ariharangura nk’uwugandariye uwiwe. Ntawuzi ko ari kubera Ikirezi ca Afrika kiguma kiva amaraso n’amosozi canke ari umuderi aba aharaye. Akazuru kiwe karagororotse akagira amaso nkayabaganwa, nutwana dukeya kugasakanwa kandi twama dusukuye bikwiye. Abakenyezi bamwe bamwe nibo bakunda kuvuga ngo, hamwe bogirisha amahiganwa y’abagabo beza ntawomuca imbere. Yoha, uravye ubwiza bw’umubiri gusa, Imana yaramuhezagiye pe ! Ubwo umutima na bwo, wobaza ba padiri na ba pasitori bajejwe gusesangura imitima vyiza na mibi, iyizoja mw’ijuru niyizohereza mu muriro udahera kwa Rusiferi, we yamana igitoro n’inkwi vyo guturira imitima yanduye.

Ahejeje kuramutsa abaje kumusanganira, yaciye y’injira mu ngoro, maze aja kuvyagira mu nyegamo nziza nk’iyo umwami. Hirya no hino yari akikijwe n’ivyegera vyiwe navyo nyene bishajije kandi bidoshe nk’uruyoya rwonka amaberebere menshi. Utereje amaso mu batumire n’abasangwa, wabona abantu beza beza, bafise akamwemwe ku munwa. Abagore nabo bari bisukuye nka za nkumi zijejwe guhaya ubwiza bw’impuzu canke umubiri. Kumpome hari hamanitse amasanamu yerekana ubutwari bwa Kananirabagabo, hasi naho hari hashashe indava y’ikizungu itukura, ntibagiye amashugwe yarari aho hose umuntu yahonyora. Nayo akamoto kayo kashwara amazuru y’uwo wese yari muriyo ngoro. Utereje amaso hejuru, wabona urusenge rw’ikizungu rukayangana hamwe n’amatara meza nk’inzahabu. Uravye ubwiza bwayo gusa, benshi mu bamenyeshamakuru mpuzamakungu bavuga ko iyo ngoro Magaburanyama iri mu zambere nziza zo muri Afrika. Ngo mugabo uravye ibihakorerwa, ingoro Magaburanyama isa n’igisaka gicumbitsemwo imfyisi zifise umugambi wo kw’isuganya intama z’abanyagihugu.

Haheze akanya, inyuma y’amajambo yoguha ikaze abashitsi n’abatumire, Kananirabagabo yaciye avyaguruka, arabanza arihweza ishengoro ry’abategetsi bavyagiye aho, aca atangura kwambaza Imana Rugiravyose, arayishimira kuvyiza yama imugirira, eka n’imigisha myinshi yama imuhonga, aca yemerera abanyagihugu ko azobandanya ibikorwa vyo kubateza imbere mukubaka amashure, mu kugwiza amavuriro arimwo za scanner, ko kandi azobandanya agwiza ibibuga vyo kuyuba, ko azokubaka amahinguriro y’ibirato kugira ntihagire uwusubira guhandwa n’amahwa, n’ibindi vyinshi.

Icatangaje benshi baraho, eka mbere n’abavyumva mu maradiyo canke babikurikirana mu mboneshakure canke ingurukanabumenyi, ni uko umukuru w’igihugu Kananirabagabo, yinamuye ati :

« Kubera ko mwatwizigiye mukadutora k’umwaka uheze, mukadukura mu menyo ya vyabinyamushinya, bimwe vyirigwa biraducira imizi y’ukuzimu bibicishije mu maradiyo, mumboneshakure n’ibindi bimenyeshamakuru vyandika ; kuberera ko ataco mutakoze kugeza aho mw’iremeka amasandungu n’imifuko y’amajwi yari yasanzaye, amajwi ya zamburabugirire zitazi gutora icatsi n’ururo, zitazi gushima nagato ibikorwa dukora, mugaheza mukayashikana atagipfuye kugeza aho amakungu, na cane cane bamwe barungikwa na bene ibigega vy’Isi yose bemeza ko yagenze neza ; ivyo navyo bigatuma tuzoguma dusomera. Kubera ko n’abandi bajejwe gukebura Leta atanyungu za politke bakurikirana na bonyene baciye bemeza ko amatora yangenze neza, ko kandi yabaye mu mutekano ntangere bivuye kubukerebutsi n’ubwitonzi mwabigiranye ; ivyo navyo bigatuma igihugu cacu Ikirezi ca Afrika, za mburabugirire zisigaye zita « Igisebe ca Afrika », gisubira kuronka agateka mu makungu, ivyo navyo bigatuma mbere citwa « Umuco wa Afrika » kubera catanze akarorero keza ka demokarasi muri Afrika.

Kubera mwadutoye mutitangira itama kugeza aho intebe nka zose zitwegukira kiretse izo twahebeye abadacikana, bamwe bameze nk’urunyondwe rwumira ku rushato rw’inka naho iba yapfuye, bamwe ba Nijimbere, mugabo bakaba badufitiye akamaro kanini kuko bica vyitwa ko intwaro rusangi twayitsimbataje mukwemera kugabura n’iyindi migambwe. Kubera bamwe duhiganwa baciye bagwa mugahundwe, kugeza aho bamwe bamwe muribo bahahamuka n’ubwoba, bamwe bagaca mu vyanzo, abandi mu ruzi batazi kwoga, abandi n’abo bakaguruka kandi batari inyoni, tutibagiye abanyegeye mu myobo batari ifuku.

Kubera ko rero tugiye kuba kurya kw’impfizi yanesheje izindi zose m’urwuri isigara yivuga yonyene, ikaba ifise uburenganzira bwo gutunganiriza inka zose ziri muri rwo, tugiye kugira ico twita: « Tolérance Umuliyoni ».

Amashi yaciye asamirana hirya no hino. Ingoma zirasasira, vya muzinga birayaga. Mu kiringo c’iminota cumi, wamengo isi n’ijuru vyafatanye. Nanje, eka mbere na bagenzi banje, twatekewe n’agahitsi n’ubwoba. Umushatsi wamengo urankorotseko. N’umva amara ariko araka n’ibaza ico ivyo bintu Kananirabagabo abigiriye biransiga. Icantangaje kandi, n’uko hirya no hino abategetsi nka bose baraho bari bafise akamwemwe ntangere. Haciye akanya asubira afata rugagamishamajwi ati:

Kubera ko benshi muri mwebwe batahonyoye muri kaminuza, imvungo nshakanshatsi twakoresheje ku mwaka uheze ntimwayitegereye. Abavyumvise, baravyumvise, kandi barabikurikije. Tukaba tubashimiye bivuye ku mutima. Kubera umutima w’ikigongwe dufitiye abo batategereye iyo mvungo, twashimye kubibahishurira kumwe kw’Imana yahishurira Mose amabwirizwa cumi yayo ku musozi Sinaï.

Kuva ubu rero, mugiye kugorora amaboko muje muriha atankomanzi ico cose mukeneye mukazi mujejwe, nakare ngo “Impene irisha aho iziritse”. Uwuri kw’ibarabra azokamisha ibarabara, uwutwara ihunguriro rya Leta areteshe aho nyene; uwicaye mu nyegamo yo mugisata c’intwaro yegame, agare kugeza aho bamushikanira kugira ashobore kushira ikidodo k’urupapuro rwose, nka zakarangamuntu, ibitabo vy’inzira canke imodoka, n’izindi. Nayo abakeneye akazi, bazobanza kuraba ryiza umufuko wanyu, hanyuma musuzume ko ari abanywanyi bacu mu mugambwe, hanyuma ivyo ubumenyi bize munyuma. Ico ni co twita Tolérance Umuliyoni.

Abigisha namwe mugabanye induru, muheze mw’ikore kw’ikaramu itukura, maze mutore ibibazo bitagira inyishu, hanyuma murambe ubusa abanyeshure banyu kugeza aho inoti ziseseka mu mifuko. Abatagira uburyo bw’amafaranga bikore ku butunzi umubiri wabo usanganywe. Nico twita Tolérance Umuliyoni.

Abajejwe amakori n’amaduwane, mweho ntimutugoye musanzwe mumenyereye iyo ngendo. Ntimuhagarikwe umutima na rurya rwego rutwagwa n’umuzungu rwadutse nk’akaranda kugira icasomera gisubire kuvoma; rurya tuzoruca mu myanya y’intoke kumwe twabigirira abo duhiganwa. Kugeza ubu, amakonteneri azohora yinjira ijoro ahagatiwe n’abapolisi kugirango bamene umutwe agakozi kago kazohirahira kagakirutsa umutwe kugira kayasuzume. Uko niko politike ya Tolerance umuliyoni itegerezwa kugenda

Inyamiramabi namwe, murazi ko igikorwa kinini arimwe mwagikoze, mugiye gukora mu mwindegemvyo nta ngere. Abanyagihugu babagoye muzobacisha kubuhombo kandi ntimuze murita ku basuma. Abanyagihugu babatabaje muzokwega amaguru, musange bayanyaze, nakare ngo “Inyamiramabi nziza n’iyiramvye”. Mbere bishobotse muzokorana n’inkozi z’ikibi kugira namwe imifuko yanyu ibomboke. Nivyashika mugatata n’abanyagihugu, hakagira abahitanwa n’agashavu kanyu kubera banse kubaraba ryiza, muzobabika mw’ibuye canke mu nzuzi; maze ingona zibisuganye nakare zirashonje. Babajije, muzobishura ko bitaye m’uruzi batazi kwoga, uruzi nago rurabatwara. Aho niho muzoba muriko murashira mu ngiro umugambi wa Tolerance Umuliyoni.

Abajejwe amasoko ya Leta namwe umugambi Tolérance Umuliyoni ntugiye kubibagira nagato. Kuva ubu, mugiye gukora mu mutekano ntagere; muzoha isoko umurwizatunga yibwiye ikintu. Kugira akazi kaborohere, tugiye mbere kubigisha ubuhinga bwo gusoma ibiri mu mabahasha imbere y’uko y’ugururwa icese. Ico nico twita Tolérance Umuliyoni.

Sinirigwa ndadondagura ibisata vyose vy’igihugu. Nagomba ku bibutsa ko ivyo vyose muzobikora musenga, mw’injira aho hose mubonye isengero, mwambaza Rugiravyose, niho umugambi Tolérance Umuliyoni uzoranguka nkuko tuvyipfuza. Maze mutunge mutunganirwe, mwubake amazu meza na cane cane amwe maremare yagaza ijuru, amwe areha n’Umunara Babel kugira mushobore kubona iyo mwamuka muzicayeko na cane cane mushobore kuvugana n’Imana muri hafi yayo. Mufungure ico cose mwipfuza, nimwahaga muje kw’idaha muri za vomitoriyomu tuzotegekanya aho hose hari uburiro bw’iteka, mugaruke musubire mw’ihereza, muhimbe muhimbagwe, munwe za henerabakene nizindi njabuka zose, eka n’umupfasoni abahagaritse amaraso mucishe kubuhombo, n’akare ngo “Impfizi ntaho y’imigwa”. Niyo vyashika umugabo w’iwe agakirutsa umutwe, muzovuga ko asara, maze mw’ikore kunyamiramabi zacu, nazo zimwihutishe ku bitaro vy’abagwaye mu mutwe, nabo bamutere rwa rushinge rwo kuca inkokora abasazi bagwana. Aho niho muzoba muriko murashira mungiro ingendo ya Tolérance Umuliyoni. Yoha n’umvise ivyo bintu Kananirabagabo ariko aravuga, naciye n’umva nohagarika akazi nariko ndakora. Erega amasozi yantanze hasi kandi ndi umugabo. Ca wibaza nawe kugutwara umugore bakongera bakavuga ko usara! Sha, n’ibisigabwenge.

Haciye akanya yaciye asubira ati: mugabo, kugira ivyo vyose bishoboke, hariho imigwi y’inkorabara itanu tutegerezwa gukenyerera bikomeye. Nakare musanzwe muzi ko atawusomera induru ivuga. Uwambere ugizwe na yamasutwa, bamwe bagasuku, bamwe bama bariko barazura akaboze; turabibemereye, tugiye kubahira umuti ukomeye. Abazokwihenda bagatanga inkuru zidatomoye, zimwe zo gutsyoza ubutegetsi bwacu, tuzobabika mw’igereza. Turazi ko batazohengeshanya kuvuza induru, bataka amakungu nkuko basanzwe babimenyereye, tuzokwica amatwi, maze bavundireyo, niho bazokwikebuka.

Umurwi wa kabiri ni umwe w’abiyita ko badaharanira inyungu za politike, ko baharanira agateka k’abanyagihugu kandi batabatumye, tuzi ko bagwanira inda zabo, tuzobazimanganya. Niyo amakungu yasemerera kubera ko ariyo abafata mu mugongo, nabo tukaba tubakeneye kubera infashanyo zabo; tuzovuga ko biyahuye. Mukubahuma amaso, tuzotumako igipolisi co hanze, kimwe ceserewe mugutohoza, mugabo gishitse tukiburagize nkuko tumaze kubigira, kitwatse amakanda tukiyime nakare ntamugabo atanga amakanda yiwe atari igitungwa. Maze kibure epfo na ruguru gite comoke canke cimene. Imana niyo nkuru.

Umugwi wa gatatu kandi tuzokenyerera cane kuko ariwo uteye ubwoba kubera w’iyita ngo ujejwe kudukebura, nawo uguma urondera aho dufise ubupfu ngo uduce mu ryahumye, tugiye kuwuzingamika; tuwugire umusega kugira ntuze usubire gukuga. Noneho musanzwe muzi ko umutwe wawo wacitse kubera usigaye uvugira mu mahanga, no mu myobo. Natwe ico tugiye kwitwararika n’ugutoteza abanywanyi bawo kugira nabo bate bomoke maze bahamvye ba shebuja canke binjire mu mugambwe wacu ku nguvu. Abazonana, bakigira intagondwa, amagereza n’inzuzi bizobakiriza yompi. Maze natwe dutunge, dutunganigwe mu gihugu cacu Ikireza ca Afrika tugiye guhindura vuba na vuba “ Umuco wa Afrika”.

Naho niyo amakungu yaturemera ngo tuganire n’uwo mugwi, tuzoba ntahomfatwa, tudindize ibiganiro, kugeza aho igihe c’amatora akurikira kigera ataco barahatora, batahe zirayoye, bidoga bongera biha iryosozi nk’akana kavuye kuragirira inarume.

Umugwi wundi tutokwiyibagiza kandi ntarekuriwe kuvuga ivyawo hari amaradiyo n’imboneshakure, n’umwe ujejwe gucungera imbibe zigihugu. Uwo nawo, kenshi urizingamika nk’inzoka, ukigira uwutarabwa n’ivyapolitike, mugabo hari aho uza ubona waduka, maze ukadukura amata mu kanwa. Tutiriwe turavuga menshi, mugihe cose ikigega c’igihugu kizoba kibogaboga nibo bazobomboka ubwambere. Maze natwe tubagirire akabirya tubongere imyaka yo gukukuruka, abakuru babo tubahe ipete rya ntanyiganzwa, tubahe agashara gafatika, tubaronse abatoni n’abakorezi, ingendeshwa n’ingaburo za Leta maze bazopfe barya nk’abana b’abami.

Umugwi wanyuma dutegerezwa gukenyerera bimwe vyeruye, dusamaye nawo nyene ushobora kudusambuza ni umwe w’abacamanza biyita ko bafise ubwigenge ntayegwayezwa. Kuva ubu ubwo bw’igenge turabubapfyituye kanatsinda nitwebwe tubaha akazi, tukabahemba, tukongera tukabashira gukora ku mugwa mukuru w’igihugu canke mu minyaganyaga bivuye uko tubiyumvamwo. Kuva ubu rero, murafise ububasha bwo guhindura ingigo yose ya sentare itabashimishije, maze mukikora kubashikirizamanza nabo bakaremeka inkono ishushe uwo wese ababangamiye, bakadukana icaha kitagira umutwe n’amaguru gukira bashobore kumurungika mw’igereza, na cane cane abamenyeshamakuru, abiyita ko baharanira agateka kazina muntu n’abashingwamanza.

Mugabo ntimuze mukangwe ningendo yo kwikora munda tugiye kugira. Kubera ko dukeneye amakungu, tuzobika mw’igereza bakeye muri mwebwe kugira tuyahume amaso, maze za miriyaridi zinfashanyo dukeneye zize ziseseke mukigega c’igihugu, hanyuma natwe tugire amikoro afadika. Mugabo abo bose bazoguma ari abacu, kandi tuzobategekaniriza akabahasha kuri ico cose tuzoronka kugira imiryango yabo igume y’ifashe. Munyuma, tuzoheza tubeze, tubahe agahengwe, basubire mukazi no mu miryango yabo, maze batunge batunganigwe. Iyo niyo twita ingendo nziza ya Tolérance umuliyoni.

Imbere yo kurangiza, twagomba gusubira kubibutsa ko ingendo ya politike nyamukuru y’intwaro yacu ari Tolérance umuliyoni. Kandi ko mutogira ubwoba nagato. Ntimuze mukangwe na rurya rwego rujejwe gukurikirana abanyuruje canke basesaguye itunga ry’igihugu: rurya twarushinze kugira ruhashe abivye igitoke canke ivoka, abivye ibiharage munkono canke abakoze mu mufuko w’abandi, n’abajejwe ibigega vy’amakomine. Ivyo navyo bigatuma abanyagihugu baryana, umutekeno ugahungabana mu gihugu.

Ntimukangwe kandi na rwa rwego rwirirwa ruravuga aya Muhe, rutuma agatoki mu masahani yacu. Arya ni amacandya, ntanakimwe ruzopfa rushitse ko. Ntimwongere nagato ngo muhagarikwe umutima na babashingamateka canke abakekunzamateka bita mu bitabaraba. Uwuzobagora muzoheza mumuhe amashi canke mumwangaze apfe arohera mu karere ko mu mahanga nk’inka yazimiye. Mbega kuva batanguye gusemerera harico muraba? Twe twize amashure menshi, mbere tukaminuza reka tubacire umwibutsa w’abafaransa: « Les chiens aboyent, mais la caravane passe », nu kuvuga ngo « Iminihiro y’imbwa ntibuza ingenzi kurengana”. Imana niyo nkuru.

Ni hahangame igihugu cacu Ikirezi ca Afrika

Ni hahangame umungambi Tolérance Umuliyoni

Ni harambe Umukuru w’igihugu Kananirabagabo Jean-Nemrod

Murakoze

Yoha, amashi yaciye asubira gusamirana. Impundu zikwira ingoro yose Magaburanyama, ingoma zirayaga, abagore n’abagabo barahoberana. Nanje aho ndi nakwiwe n’agashitsi umubiri wose. Ibinyanya birantera mu maguru. Ndibaza ico Kananirabagabo agomvye kuvuga biransiga. Nca ndajanwa kugeza aho nibagira gufata amajwi n’amasanamu asozera ibirori. Mukanya kakurikiye, Kananirabagabo arahaguruka, munyuma akanira gasubira kw’umvikana, k’iha ibarabara, ingendeshwa n’indege bisubira kwiha isi n’ijuru mpaka munzu y’uburiro yo mw’ihoteli y’agateka yitwa Ameru y’Imfyisi aho ibimasa vyari vyamashuwe bikwiye. Abanciriye agace, bambwiye ko babishishimuye n’akayabagu karengeye aka nyamyoma iriko irihereza intama. Bene wacu, uwapfuye ntaco yabonye pe !

jeudi 28 juillet 2011

Le soleil se lève

Voilà que se lève le soleil
Il faut sortir de notre sommeil
L’amorphisme déjà révolu
Nos questions se verront résolues :
Nous tous voulons la place au soleil.

Le temps de bouder est disparu
Le temps d’émergence est apparu
Il faut ouvrir nos portails
Et laisser entrer les merveilles :
L’ère de lumière est apparue.

Je t’aime pour toujours, soleil
Car tu as une charité sans pareille
Ce fut ainsi, point de disparus
Tout le monde serait bienvenu :
Hélas, ça n’a pas été pareil.

Il est grand temps d’emprunter la rue
Qui même au village des Elus
Où ne règnent que paix et travail ;
Ils sont issus des mêmes entrailles :
Leurs différences sont sans issus.

(Extrait de Salvator-Sur le Sentier vers le Village des Frères, de Diomède Mujojoma Publibook, Paris,Décembre2009)

jeudi 7 juillet 2011

A force d’hirondelle

A force d’hirondelle
De battements d’ailes optimistes
D’arbrisseaux aux gros arbres, de buissons aux touffes de ronces
Nous briserons les liens de la mort
Vers les terres d’Espérance
Nous nous débarrasserons des vêtements de deuil
La rosée s’évanouira moins vite que nos soucis
L’éclair clignera son œil, nous serons passés dans une autre époque
A force d’hirondelle
Nous nous laisserons emporter dans un nouveau vent
Et nous planerons dans de nouveaux cieux
Vers la plénitude
A force de courage et d’audace
Nous ne nous laisserons plus engluer dans la boue du quotidien
Nous regarderons vers les cimes des volcans
D’ou émanera l’appel à la nouveauté
A force d’hirondelle
La Grâce ravivera nos espoirs et nos vœux les meilleurs
Et la Providence nourrira notre attente
Les nuages pourront virer au noir
Il pourra pleuvoir nuit et jour
Les montagnes pourront bien s’affaisser
A force d’hirondelle
Nous planerons dans l’Espérance
Nous braverons les tempêtes
Et attendrons dans l’Espérance la naissance d’un nouveau jour
De Dieu

Par Thierry Manirambona

mercredi 29 juin 2011

Le chômeur

Discours entre un chômeur (en italique) et un poète
par Thierry Manirambona & Roland Rugero

Au nom du Père et du fils et du Saint Esprit…
Vers les cités interdites de la République, je m'incline
avec respect, les larmes dans les yeux et une faim qui me tenaille
je m'incline
car, pas plus tard que demain, je serai à l'autre bout du Tanganyika

tiens, un homme est adossé contre un vieux poteau
c'est con comme il s'arrête à tout instant
con son regard,
regard hagard, des yeux béants
des yeux étincelants de soif
assoiffé de boulot, assoiffé de respect
déshumanisé
et pourtant il avait tout...
un diplôme chiffonné
qui a fait le tour des ministères
et de tous les bureaux de la ville
une chemise sans aucun bouton qui laisse voir son torse
et ses bras minces
des bras d'un homme affamé
un homme désespéré
qui est-il ce marcheur ?

Kyrie Eleison
du pain du pain et de la chaleur
je meurs de froid, de tentation et d'une débauche qui me fait mal

Il a les yeux rouges de joie
Il a les mains sales de ne rien faire
Il a la peau caillée de froid, de chaud
Il n'en sait plus rien. Il vit entre ciel et terre
Exactement sur l'avenue de l'Indépendance
Où il chante chaque matin la Messe de la Faim

Je danse la messe du pêcheur
petit poisson deviendra grand ?
Jamais
mon œil
petit poisson,non !, petit paysan mourra petit
petit poisson ne deviendra jamais grand
on le pêchera, on le mangera cru
les gros poissons l'avaleront jeune
petit poisson, petit fonctionnaire, jamais, ne deviendra-t-il grand

C'est un fonctionnaire de quarante-cinq ans,
Grand militant devant Dieu et les hommes
Du Parti pour le Peuple, le Patriotisme et la Paix
Par lucidité : « Occupe-toi d'elle, sinon elle va
Se charger de toi », lui a-t-on toujours conseillé,
Par volonté donc, il s'est marié au PPPP

au nom du père et du fils et du saint esprit
je meurs
amen
pas de Pâques pour moi
pas de Pentecôte
pour moi : la passion
la flagellation
le pain sans levain
et des mois de ramadan, lot du chômeur

l'homme des cabarets
Quand la nuit tombe sur la ville
il s'éloigne du beau monde
et s'en va cuver sa honte dans des coins mal éclairés
loin des regards de ses anciens amis
il n'a ni sou pour une liqueur bien décantée
ni le courage d'aller à la plage
ni la joie d'être avec ses semblables, les chômeurs
voltigeur des saisons, il s'en va
lent comme la tortue des collines
y a comme des rais de démence dans son regard
et un immense désir de partir très loin
il n' a pas le courage de finir comme un homme
tant la misère l'avilit et le déshumanise

de tout ce qui me reste, à la boulangerie la plus proche
j’achèterai trois pains
et deux cartes postales
des cartes postales avec de grosses images du pays
histoire de mourir patriote
et trois pains de viatique
un pain pour le mendiant qui demandait la charité avec moi
un pain pour apaiser ma faim
et l'autre pour l'agent des morgues
qu'il ait la force de m'achever
et de m'enterrer dignement
et d’écrire sur la pierre tombale
en gras caractère et en trois langues
le grec, le kirundi et une langue encore inconnue
« Ci-gît la misère »
« Ci-gît un chômeur »

Que ce fut beau ! Tenez : au soir d'un jour de mai 2015,
Il s'en allait par allées et travées endimanchées
De couleurs vives de son parti-amour, chantant
Les mérites d'un message fort, vigoureux, viril,
Engagé, éternel, charmant, unique, sain,
Triomphant et salutaire. Il en était un disciple.

Je ne suis, désormais qu’un marcheur affamé
Interdit des cités de la République
Là où je vis
y a des territoires des pauvres
des cités endormies pour veuves
et des orphelinats pour les chômeurs
y a aussi des policiers pour tabasser les mendiants
des tireurs d'élite pour les prostituées
y a à chaque coin de la rue
des kiosques qui, la nuit, proposent des menottes
pour les sans abris
y a de la boue dans les oreilles de la mairie
y a des trous, des fosses septiques sur le long de mon chemin
y a des villas pour le beau monde
y a des palaces pour la loi, les textes
y a des gratte ciels pour les gens qui font l'amour trois fois par jour
histoire de défier la résistance des matelas
quand le froid fait rage dans le dos du chômeur
je me dégoûte
je me dégoûte
Et je regrette les dîmes et les sommes versées dans la caisse publique

Le PPPP était devenu son pain, une ligne de conduite
Et d'hygiène. Il regardait le parti comme l'enfant
Fixe le sapin. Il aimait le parti comme le mendiant chérit
Une bonne mie de pain. Il bénissait le parti comme l'Ange
dit un jour : « Bénis soient les fruits de mes entrailles ».
Et il chantait tout cela à tue-tête, la tête tournée vers le ciel.

je m'érige, non en révolutionnaire
je me dresse, comme une folie qui bouillonne
un mourant qui déplore
un
deux
trois
quatre
je compte ma souffrance sur un kilomètre
sur cent kilomètres
sur tout le long de ma vie
de salaud
de mendiant
je pue
que je suis laid !
Avec une barbe d'un mois
des ongles qui sortent des chaussettes
une calvitie sur laquelle sont parsemées des touffes de cheveux rebelles

Avenue de l'Indépendance, il y passait, des chaussettes
A la chemise, du slip à la casquette, de gauche à droite,
Harnaché des symboles du PPPP. Il n'en était pas membre,
Il en était un bras, une jambe, un organe à lui tout-seul,
Prêt à servir ce corps si admirable, le PPP, devenu son Pain,
Sa Providence, son Parfum et son Père. Il l'aimait.

Je fais vœu de chagrin
Des maux d’estomac
De la pendaison
Ex graduat des écoles sans avenir
Doctorat ès Chagrin
D’une vie précaire
Je m’en vais salissant le temps.
Ce soir
de ma cravate, je vais me pendre
sur la place publique, je vais dirai adieu
je toiserai la vie avec mépris
enlèverai mes chaussures et mes chaussettes
qui puent la misère
catholique pratiquant
je ferai le signe de la croix
et courageusement je mettrai fin à tout
à la vie
au salaire
au souci
à la joie
à l'amour
et surtout au mépris
point
trait

Il a les yeux rouges de joie
Il a les mains sales de ne rien faire
Il a la peau caillée de froid, de chaud
Il n'en sait plus rien. Il vit entre ciel et terre
Exactement sur l'avenue de l'Indépendance
Où il chante chaque matin la Messe de la Faim

Et ce sera la fin de tout
Des nuits longues attendant l’appel de la République
Et des ministères qui m’assassinent d’attendre
Je n’attendrai plus
Car je mérite mieux
J’attends le dernier papillon
Qu’il s’envole pour annoncer mon départ
Et d’un geste, j’arrête le moteur
Je meurs, ce soir, seul
Chômeur…
De la République

mardi 28 juin 2011

Toussaint Louverture, Haïti et la France

II fut le premier pays noir à obtenir l'Indépendance après le départ de l'armée de Napoléon Bonaparte, devenant depuis le seul pays francophone indépendant des Caraïbes... Haïti, c'est aussi le plus pauvre des nations du continent américain, avec plus de 50% de la population dans la pauvreté totale. Dans ce documentaire de 52 minutes réalisé par Laurent Lutaud, il y est question de Toussaint Louverture, surnommé le « premier des Noirs », qui meurt dans un cachot en France en avril 1803. Ce film retrace la vie de Toussaint Louverture, à l’origine de la première déclaration d’indépendance d’une colonie : « Derrière cette figure de légende, c’est l’histoire exemplaire et tragique d’Haïti qui nous est présentée … mais aussi celle de l’esclavage en France, un phénomène considérable et pourtant méconnu », annonce le programme de l'IFB, qui propose la projection du film ce mardi 28 juin à 18h. Le débat sur ce documentaire se poursuivra le jeudi 30 juin au café-littéraire Samandari, de 18h à 20h avec le commentaire fort éclairé de Dr Colin Nicholls, représentant de l'Unesco au Burundi. (Roland Rugero, Iwacu)

lundi 13 juin 2011

Autour des mots : quand le Samandari rencontrait Ishyo Arts Centrer...

C’était à Kigali. Samedi 29 avril 2011. Il faisait chaud, ce soir-là. Une chaleur née d’une rencontre entre Ishyo Arts Centre, un centre culturel rwandais au cœur de Kigali et le Samandari, un café-littéraire burundais. Une soirée de partage. Par Thierry Manirambona.

La soirée commence par l’ikondera, la corne. Du fond de la salle s'avance une danse. Trois jeunes gens miment la vache. Un pas en avant et puis un autre. Dandinements : le souffle puissant des danseurs traverse les cornes de vache en donnant un son qui embaume l'atmosphère de tons puissants. Une fois sur scène, les danseurs restent comme figés. La danse et la musique se meurent pour laisser une voix féminine, chaude, lire un texte. Il existait un homme du nom de Samandari ...
Ainsi commence la lecture des textes préparés pour la soirée littéraire.

La lecture du premier texte finie, Carole Karemera, à la tête d'Ishyo Arts Center accueille les invités, trois membres de Samandari Ketty Nivyabandi, Roland Rugero et moi-même. Puis le regard se tourne vers la trentaine de personnes présentes : des comédiens d’Ishyo et des habitués du centre avant de laisser Ketty et Roland, initiateurs du Samandari, parler de la naissance et des activités du café littéraire burundais.
Le décor de la scène change. L’ikondera reprend. Certains projecteurs sont éteints sur scène pour ne laisser qu’une faible lueur presque bleue : une ambiance poétique pour passer aux choses sérieuses. C'est le moment d’écouter les textes de la soirée.

Une ambiance de paix

Des hauts des tabourets, Carole et trois comédiens, une jeune fille et deux jeunes garçons, lisent les textes. Le silence est totaItaliquel. On n’entend les mots lus et chantés fendre le silence pour créer une atmosphère de paix, de quiétude. Le sourire et l’enfant de Roland (nouvelle primée d'une médaille de bronze aux VI èmes Jeux de la Francophonie à Beyrouth) , L’albinos de Thierry ( Premier trophée au Prix Michel Kayoya 2010), Trois ethnies et Les petits hommes de Ketty.
Du fond de la salle arrive l’écho des phrases chaque fois qu’un des comédiens sur scène hausse le ton. Dehors, il fait nuit mais on ne veut pas rentrer. Le public veut écouter les mots qui viennent de l’autre côté de la Kanyaru, du royaume de Nyaburunga.

La lecture d’un texte laisse place aux réactions. D’abord timides, les réactions abondent par la suite sous forme de commentaires directs, des questions aux auteurs… et le temps file sans qu’on s’en rendre compte.
La réaction aux lectures par les comédiens se prolonge avec des vers d'un vieux texte qui traînait depuis 6 ans dans les poches d’Hervé, un des comédiens, avant que ne débarquent les Premiers désir de réunion de Carole, un texte touchant que toute maman aimerait écrire à l’enfant qu’elle attend : Si tu viens au monde, je t’inonderai d’amour / Je te bercerai du soleil, de larmes de bonheur… /Tu ne découvriras jamais l’obscurité de la haine, de la solitude de la haine…
Enfin surgit Pays des grands lacs, mon amour, ma douleur, un long texte nostalgique sur le Burundi...

Une histoire partagée

Ce qui frappe le plus après la lecture des différents textes, c’est le fait que la douleur ressort vigoureusement des textes des Burundais et des Rwandais. Vive, lancinante, la souffrance s’exprime dans un poème qui s’adresse au pays natal que l’on a quitté tôt et qu’on aimerait revoir. Elle s’exprime par des mots d’indignation, des souvenirs atroces des guerres et des images que l’on n’oublie jamais.

En même temps, comme le dit bien le poème de Ketty, Trois petites ethnies; en pointant ces trois ethnies, une seule agonie, il y a le rappel que Rwandais et Burundais partageons beaucoup de choses. Que presque tous les textes littéraires présentés ce soir-là aient un ton de chagrin, soient des textes lyriques qui expriment la douleur des deux peuples cela fait comprendre l’histoire presque similaire des deux peuples voisins. Le Rwanda a connu des moments durs dans son histoire, le Burundi a été secoué par des atrocités sans nom.
Toutefois, les écrivains de part et d’autre de la Kanyaru ne parlent pas que de la souffrance. L’espoir, la joie, l’amour sont présents. Et d’ailleurs, notre mission rappelle-t-on dans la salle, c’est de véhiculer l’espoir.

Un forum

Si la littérature a été longtemps un domaine d'initiés, le Samandari et l'Ishyo Arts Centre, par les différentes rencontres qu'ils offrent peuvent prouver que " la littérature fait partie des expressions artistiques possibles et accessibles ", rappelle Roland. Il n’y a plus que des concerts, des expositions d’œuvres d’art plastique, il y a aussi, désormais, la littérature qui attire pas de plus en plus de gens. La preuve : ces soirées du Samandari que l'on décrit à Kigali, où ce petit monde réuni à Ishyo ce soir du 29 avril...
Outre la littérature, les deux espaces sont aussi des forums d’échange. La littérature n’est pas que lyrisme qui parle amour, déception, romance. Elle crée aussi un lieu où l'on parle de société. Lyrique, tout écrivain est un jour engagé, pour une cause ou une autre.

mardi 24 mai 2011

Quel "intellectuel" africain ?

Integralité du texte sur : http://www.africultures.com

COMMENT PENSER L'AFRIQUE ? DE LA FAMILLE AFRICAINE, DES ARTISTES, DES INTELLECTUELS, DE LA CRITIQUE ET DES ÉVOLUTIONS DE LA CRÉATION
entretien d'Achille Mbembe avec Célestin Monga
en partenariat avec Le Messager, quotidien paraissant à Douala au Cameroun

Laissons de côté, du moins pour l'instant, les arts et la vie quotidienne. Examinons plus précisément la critique menée par les intellectuels, en faisant momentanément abstraction du fait sociologique qu'en Afrique, la notion d'intellectuel joue, avant tout, des fonctions polémiques.

Vrai. Tu poses là le problème de la définition, du statut et de la fonction de l'intellectuel dans une société affamée comme la nôtre. Comment le définit-on et à quoi le reconnaît-on ? Les artistes illettrés qui font du reggae ou du couper-décaler dans les faubourgs d'Abidjan dans l'espoir de changer la société ivoirienne sont-ils des intellectuels ? Les diplômés au chômage dont le nombre augmente chaque jour dans les rues des grandes villes africaines, sont-ils des intellectuels ? Les "grands professeurs", les "docteurs Machin" que les partis uniques d'hier payaient pour mettre leur compétence au service de la répression et qui, aujourd'hui encore, prescrivent l'obscurantisme sur nos chaînes de télévision nationales sont-ils des intellectuels ? Un mathématicien Sénégalais qui réside à Londres, se voudrait un amateur de cuisine chinoise, écoute exclusivement la musique de Beethoven et se nourrit de philosophie française est-il un intellectuel africain ? Un professeur sud-africain de danse moderne installé à Broadway qui ambitionne de penser la vie sociale à New York à travers une œuvre inspirée de Gershwin et de Maurice Béjart est-il un intellectuel africain ? Un écrivain congolais ayant étudié en Russie, installé en France et n'ayant pas remis les pieds dans son pays natal pendant trente ans est-il africain ? Si l'intellectuel africain existe, comment s'exprime-t-il et quels critères et cadres d'analyse doit-on utiliser pour cerner, évaluer et juger son engagement ?
Et puis, a-t-on le droit de juger de l'engagement social d'autrui ? Qui serions-nous pour énoncer des hypothèses de bonheur social et prescrire une manière unique d'être Africain - et une seule façon de voir ? L'intellectuel africain a-t-il un devoir de participation à la gestion des affaires publiques ? A-t-il un devoir d'influence sur la direction que doit prendre le mouvement social - ce qui suppose un postulat de compétence ? Le cadre africain est-il plus forcément "éclairé" que les populations au nom desquels il parle ? Dispose-t-il de la légitimité et de la confiance nécessaires pour légiférer au nom du continent, comme se demande ironiquement Chinua Achebe? Nous ne sommes pas les seuls à nous buter sur ces questions. De Julien Benda à Edward Said et à Fabien Eboussi Boulaga, les représentations de l'intellectuel n'ont cessé d'être questionnées.
Pour moi, finalement, un intellectuel est quelqu'un qui ambitionne d'élargir les frontières du stock de connaissances dans le but de donner plus d'épaisseur à nos vies, ou de nous pousser à prendre nos responsabilités. Travaillant sur des idées, il met la réalité en concepts. Il confronte les orthodoxies et les dogmes au lieu de les produire et de les gérer. Il garde l'esprit ouvert et pose les questions les plus embarrassantes à la société et à lui-même.

Admettons la difficulté. Mais au-delà de l'interminable questionnement au sujet du statut et des fonctions de l'intellectuel, y a-t-il très précisément des lieux aujourd'hui où s'effectue une critique spécifiquement "intellectuelle" novatrice ou transformatrice ? Quels sont-ils ? Et s'il n'y en a pas, à quoi cela tient-il ?

Les lieux où s'exprime une critique "intellectuelle novatrice ou transformatrice" - pour reprendre tes termes - ne sont pas statiques. Ils ont évolué au rythme du chaos de notre histoire socio-politique. Pendant l'époque coloniale, ce sont surtout les syndicats, les mouvements d'étudiants comme la Feanf, et les partis politiques indépendantistes qui hébergeaient la réflexion critique. Il y a eu ensuite l'euphorie des années soixante : beaucoup d'intellectuels africains avaient été grisés par les indépendances que le Général De Gaulle nous a généreusement accordées après avoir annoncé à Alger : "Je vous ai compris"… Ils se sont endormis brutalement, comme sous une cure d'opium. C'est surtout à la fin des années 1960 et pendant la décennie 1970 qu'ils se sont réveillés. Certains se sont alors réfugiés dans des universités comme celles de Dakar (Sénégal), d'Ibadan (Nigeria) ou de Makerere (Ouganda). D'autres ont continué de publier auprès de maisons d'édition comme Présence Africaine, Maspero ou Zed Books, ou encore dans des revues académiques comme Ethiopiques et Abbia. Des cercles de réflexion, et parfois même des cafés littéraires ont parfois vu le jour.
Aujourd'hui, la critique intellectuelle la plus pointue est enfouie dans les journaux africains, dans les blogs de l'Internet, et dans quelques revues académiques au tirage malheureusement confidentiel. Il y a également quelques voix rauques et discordantes sur les campus universitaires ou dans des maisons d'édition dont les ouvrages sont hors de prix. L'audience et l'impact de cette critique sont donc limités. Pour être percutante, elle devrait investir les lieux de grande écoute comme les nouvelles chaînes de radios et de télévision, s'infiltrer dans les programmes scolaires, et pactiser un peu mieux avec des vecteurs de communication populaires comme le cinéma ou le théâtre. Sinon, elle continuera d'apparaître comme la triste rengaine d'intellectuels aigris, et donc comme une forme d'agitation exotique et destinée à l’auto-célébration.

mercredi 18 mai 2011

Respect et liberté

par Joëlle Tuyage Barigume

À la vue de ces fils argentés
Qui ornent la toison de nos aînés,
Nos yeux resteront-ils aveuglés?
Pourtant leurs regards fouillent les nôtres
Dans l’espoir d’y découvrir le reflet de leur propre sagesse.

Que la Source de ce Savoir prenne la mesure de nos passions;
Que le Guide de nos âmes fasse de nos cœurs sa demeure.

N’est-il pas juste que le Temple du Guerrier renaisse ?
Plaira t-il à la nature de Corps de trouver repos,
De goûter au répit…

Dans ces délices parfumés;
Dans ces petits gestes inachevés,
Longtemps appris;
Dans la rosée des mémoires dépoussiérées;
Dans l’aube du commencement !

samedi 14 mai 2011

La prière

Par Gode Nahimana

Ceci est le cri lancé à Lui, qui entend, qui voit, et qui comprend. Va-t-il réagir? Ceci est une goutte de larme claire d'amour, salée par le quotidien.

Je te l’adresse par l’aurore qui se dresse le matin,
Par le sentiment étrange qui me traverse l’esprit,
Je te l’adresse quand me pénètre l’odeur du gratin,
Par ce rayon du soleil qui me surprend et m’éblouit.

Cette plaine infinie qui chaque jour m’étonne,
Et qui s’étend de tout côté jusqu’à l’horizon,
Ce buisson qui pour moi a une valeur monotone,
Et la rosée qui s’évapore peu à peu du gazon.

Cet enfant dans la rue qui ne sait que tendre la main,
A ce monde féroce sans yeux ni coeur,
Aveugle à la beauté à l’ignorance du lendemain,
Elle est à toi ma prière que je t’adresse sans rancoeur.

Et ce savant qui invente les merveilles et les méfaits,
Ce visage inconu et sans nom qui me croise sans me voir,
Ma prière est à toi par l’attention de ces faits,
Je te l’ardesse avec ferveur en espérant l’apercevoir.

L’amertume qui m’étreint quand l’incertitude m’oppresse,
Cette insulte spontanée qui me sort des entrailles,
C’est la prière du fond du coeur que je t’adresse,
Tout en croyant ardemment aux retrouvailles.

Par ce monstre qui dévore plus faible que lui,
Ce frémissement d’une amante qui se donne sans recevoir,
En fixant par la lucarne la lumière qui luit,
Elle ne sait peut être pas qu’elle va concevoir.

Par la nuit noire et profonde, envahie par des monstres troublants,
Ce plomb qui m’écrase et qui engourdit mon corps,
Cet inconnu qui me grise par des songes accablants,
Ma prière est ce rêve qui apparaît dans ce décor.

Je te l’adresse par le cri d’un nouveau-né et par son insouciance,
Par le souffle d’un mourant qui te supplie et de maudit,
Je m’adresse à toi en mon âme et conscience,
Toi qui es maître des faits et des inédits.

mardi 10 mai 2011

Aujourd'hui je pense à toi

Ce poème est proposé par Alain Horutanga, à l'occasion de la Journée commémorant la Lutte contre la Traite Négrière...

Nègre
À la force du tigre.
Nègre humilié,
Nègre privé de liberté.
Arraché de tes terres,
l'errance fait de toi un chercheur de repères,
Chercheur de tes racines et de ta terre-mère.

En ce jour je pense à toi frère des sœurs.
En ce jour je pense à toi nègre de cœur.
Maudit soit l'époque de ce commerce triangulaire.
Maudit soit ce commerce sanguinaire.

Nègre d'ailleurs,
Nègre de partout,
Nègre des aïeux.
Ton frère d'Afrique ne t'avait pas lâché.
Nègre marchandise et débauché
Nègre chose,
Nègre cause.
Cause de tous les maux pour ces racistes,
Chose à posséder pour ces esclavagistes.
Chose à exploiter,
Chose à exécuter.

En ce jour je pense à toi frères des sœurs.
En ce jour je pense à toi nègre de cœur.

vendredi 29 avril 2011

FESTICAB : avant tout film, il y a un scénario...

Par Daniel KABUTO, écrivain


Cette année au Festicab, il y aura un Coin du Lecteur. Le café-littéraire Samandari se félicite de ce podium offert à ses membres (écrivains, poètes, slameurs) pour créer à l’intention des cinéphiles et admirateurs des princes de la Muse, une ambiance de détente et d’enrichissement mutuel. Un partenariat qui ne vise qu’à stimuler une tradition de cinéphilie au Burundi en soulignant qu’avant tout cinéma, il y a un scénario. Même quand le spectacle semble venir du hasard, le scénario a un créateur génial: Dieu!


L’ASEB lève le voile sur des défis de taille


Tristes réalités que celles du Burundi où la production littéraire n’existe guère. Aucune maison d’édition ; une seule librairie à Bujumbura ; inexistence de parution et par voie de conséquence pas de promotion des ouvrages produits par des auteurs burundais ou amis du Burundi.


C’est pour essayer de combler ces vides que l’Association des Ecrivains du Burundi (ASEB) veut œuvrer pour une prise de conscience, un encadrement des auteurs en herbe et surtout porter le projet de création d’un fonds d’appui à la production littéraire et d’un autre projet de création d’une maison d’édition. Tout commence comme une idée. Cette dernière prend forme et devient projet. Pour devenir réalité, il faut une mobilisation des énergies et des fonds. Il faut des partenariats. L’Association des Ecrivains du Burundi profite de la célébration de la journée mondiale du livre et du droit d’auteur pour annoncer ses projets phares.
Peut-elle compter déjà sur votre soutien ? Cet appel vous est adressé, vous, passionné ou amateur de littérature, autorité gouvernementale, opérateur économique, organisme de coopération bilatérale ou multilatérale. Inutile de mentionner que les auteurs seront encouragés à sauver du naufrage les contes, légendes et sagesses qui, avec l’oralité, partent encore en fumée avec ce sinistre constant au Burundi : « Tout vieillard qui meurt, est une bibliothèque qui brûle » !

L’association des Ecrivains du Burundi sollicite déjà votre appui pour faire en sorte que dans les programmes d’enseignement primaire, secondaire voire universitaire, il y ait des extraits d’ouvrages commis par des Burundais. Avec ASEB, faisons en sorte que les talents littéraires aident la nation et le monde à découvrir une autre image du Burundi ! Qu’on en arrive enfin à vivre ou du moins à améliorer son niveau de vie grâce à cette arme magique : la plume ou le clavier! Ensemble, « Yes we can » ! Cri de ralliement en guise d’engagement.